Burkina Faso : « J’encourage ceux qui veulent se lancer dans la vente du dolo à ne pas hésiter »
A environ 4 mois d’existence au Burkina Faso, le « CABARET DE INES » fait déjà parler de lui. Le secret de cette notoriété précoce, réside dans l’ingéniosité de sa fondatrice Tarwendpanga Bernadette Inès Ouédraogo. En effet, cette jeune entrepreneure use de la magie des réseaux sociaux au Burkina pour booster son business qui jadis était réservé à une certaine catégorie de la population burkinabè. Ce business n’est autre que la vente du dolo. Logisticienne de formation, Inès roule aujourd’hui sans complexe et de façon autonome grâce à la distribution de cette boisson faite à base de produits agricoles locaux. Et pour se faire une place dans ce vaste milieu essentiellement artisanal, la fondatrice ne manque pas d’idées aussi innovantes qu’efficaces. Bizya Africa a rencontré la jeune pousse, pour davantage comprendre son activité.
Bizya : Veuillez-vous présenter à nos lecteurs
Tarwindpanga Bernadette Inès Ouédraogo (TBIO): Je suis Tarwendpanga Bernadette Inès Ouédraogo. Je suis étudiante en phase d’inscription de Master en transport logistique à l’Institut Supérieur Privé Polytechnique (ISPP).
Bizya : Présentez-nous votre activité.
TBIO : Mon activité c’est la revente du dolo. J’achète le dolo avec une tante que je revends à travers les réseaux sociaux. Je participe également à la préparation du dolo de temps à autre. La préparation prend trois jours soit de mardi à jeudi. Compte tenu du fait que je sois au service, c’est quand je rentre les soirs et que je ne suis pas trop fatigué que j’aide ma tante à préparer.
Bizya : Depuis quand êtes-vous dans la vente du dolo et comment en êtes-vous arrivé là ?
TBIO : Cela fait maintenant quatre mois que je suis dans la vente du dolo. Je faisais des stages et entre deux stages, j’avais deux à trois mois avant d’avoir un autre stage. Donc j’avais assez de temps libre et cela ne me plaisait pas. Je me suis demandé ce que je pouvais faire pour occuper ce temps libre. Mais je n’ai pas pensé immédiatement au dolo. J’ai d’abord vendu des pagnes artisanaux. Après j’ai vendu des boucles d’oreilles, des lingeries pour femmes, etc. Je ne dirai pas que ça n’a pas donné mais ce n’est pas allé trop loin.
Une fois j’étais assise et je me suis dit pourquoi ne pas essayer de faire quelque chose avec le dolo que ma tante prépare. Donc, quand je me rendais au stage j’en parlais aux gens et ils me disaient d’en apporter ils vont gouter. Alors, si j’envoyais le dolo au service jeudi, le jeudi suivant ils en réclamaient davantage. Donc je me suis dit pourquoi ne pas revendre à travers les réseaux sociaux, peut-être que cela pouvait marcher.
Un soir j’ai publié sur mon statut WhatsApp que je vendais du dolo. Les gens ont lancé des commandes et je leur ai dit que j’allais conditionner pour les livrer le jeudi. J’ai posté les prix et le premier jeudi, ça marché. C’est à partir de là que j’ai commencé et chaque jeudi je publiais. Donc, pour l’instant les ventes c’est tous les jeudis parce que je suis seule. Mais je suis en train de voir comment faire pour que ce soit tous les jours.
Bizya : Il existe plusieurs vendeuses de cette boisson au Burkina, quelle innovation avez-vous apporté pour faire la différence et attirer plus de clients ?
TBIO : Ma stratégie pour attirer la clientèle c’est surtout l’utilisation des réseaux sociaux. Contrairement à la majorité des vendeuses de dolo qui attendent les clients, moi je vais vers eux. J’ai de fidèles clients vers qui je vais toutes les semaines pour voir combien de bidons ils veulent. Je vends également à travers ma page Facebook « Au cabaret de Inès ». Je propose aussi de livrer à ceux qui ne sont pas disponibles pour venir chercher.
Bizya : Quel type de dolo proposez-vous à vos clients ?
TBIO : L’innovation majeure dans le dolo que je vends, c’est les deux saveurs que j’ai eu l’idée de créer. Le dolo saveur menthe et celui saveur grenadine. Le processus de préparation du dolo est la même partout. Donc je me suis demandé ce que je pouvais proposer de différent. C’est à partir de là que j’ai créé ces deux saveurs et les gens apprécient beaucoup. Après ma première revente j’ai demandé l’avis des clients et beaucoup m’ont dit que c’était très bien et m’ont encouragé.
Bizya : Avez-vous bénéficié d’une formation particulière avant de débuter votre activité ? Si oui, laquelle ?
TBIO : Non je n’ai pas reçu de formation. En tout cas dans le domaine de la préparation du dolo ou de la création des saveurs.
Bizya : Comment avez-vous pu proposer ces deux saveurs ?
TBIO : J’ai imaginé et j’ai beaucoup réfléchi avant de me dire que je vais essayer les deux saveurs pour voir ce que ça va donner. Et en fonction du résultat je verrai quelle autre saveur j’allais proposer pour attirer encore plus de clients. Je suis en train de réfléchir là-dessus.
Bizya : Depuis que vous avez commencé, comment appréciez-vous le marché ?
TBIO : Par la grâce de Dieu je dirai que ça va. C’est avec la saison pluvieuse que les ventes ont beaucoup diminué. Depuis le début de la saison pluvieuse j’ai des commandes mais pas comme à mes débuts. Mes fidèles clients continuent de commander. A travers Facebook d’autres personnes m’appellent pour commander également.
Bizya : Parlez-nous des différents prix de votre dolo.
TBIO : Je revends le bidon de 1,5 litre de dolo simple, fermenté et non fermenté à 400 FCFA. Le bidon de 4 litres à 1.250 F, celui de 5 litres à 1.500 FCFA, celui de 10 litres à 2.500 FCFA et enfin celui de 20 litres à 3.000FCFA. Nous vendons également en grande quantité. Il suffit de donner la quantité et nous fixons le prix. Par exemple ceux qui veulent commander pour leurs cérémonies peuvent nous contacter même en dehors des jeudis et nous allons trouver le dolo puis leur livrer.
Pour ce qui est du dolo saveurs menthe et grenadine, je fais le bidon de 0,5 litre à 500 et celui de 1 litre à 800 FCFA. Je vends à ce prix parce que vu tout ce que je mets pour obtenir les saveurs, le conditionnement, les bouteilles et les étiquettes, il faut que je revende à 500 FCFA pour avoir un petit bénéfice là-dessus. Pour le moment, je ne vends pas le dolo de saveurs menthe et grenadine en grande quantité. Mais pour ceux qui veulent, je vends le pack de 12 bouteilles emballées à 5.500 FCFA.
Bizya : Pour une personne qui désire se lancer dans cette activité, quels conseils donneriez-vous à cette dernière ?
TBIO : J’encourage ceux qui veulent se lancer dans la vente du dolo à ne pas hésiter et surtout qu’ils n’aient pas honte. Il y a des gens qui disent que la vente du dolo est une activité pour les vielles personnes. Mais je ne les écoute pas car je sais ce que je recherche. Et à partir du moment que j’atteins mes objectifs, cela me va. Alors, que ceux qui veulent vendre ne se gênent pas même si c’est devant leurs portes pourvu qu’ils aient ce qu’ils recherchent à la fin.
Bizya : En plus de mener cette activité, vous êtes travailleuse, comment arrivez-vous à concilier ces deux occupations ?
TBIO : Il est vrai qu’avec mes heures de service, c’est une difficulté mais je m’organise. Par exemple les jeudis, Je me lève très tôt pour conditionner et me préparer pour le service. Je fais les livraisons entre 6 heures 30 minutes et 7 heures 30 minutes. Mais avant, j’appelle ceux qui sont disponibles pour me recevoir pour ne pas être en retard à mon travail. Pour ceux qui commandent aux services, je mets dans une glacière et je distribue. Ceux qui ne sont pas disponibles, je laisse à la maison. A la descente à 17h 30, je continue les livraisons en même temps.
Bizya : Un mot à l’endroit de la jeunesse entreprenante.
TBIO : Aux jeunes, je les encourage à se lancer dans l’entrepreneuriat. Même s’il est vrai qu’on cherche du travail mais personnellement je crois que l’auto -emploi est la seule voie du succès. Quand tu es ton propre patron c’est la seule manière de t’en sortir dans la vie. Tu as tes propres recettes, tu n’as pas besoin d’attendre la fin du mois pour faire telle ou telle chose. C’est à toi de t’organiser.
En plus l’entrepreneuriat aide le pays à se développer et il aide les gens à ne pas compter sur le gouvernement pour avoir quelque chose à la fin du mois.
J’aimerais avant de terminer remercier Student Entreprenor Union parce que c’est grâce à eux que le cabaret de Inès est connu aujourd’hui au Burkina et que vous aussi vous êtes là pour m’interviewer. C’est un groupe de jeune qui aide les jeunes dans le domaine de l’entrepreneuriat et je les remercie pour tout ce qu’ils font. J’aimerai également dire merci à une autre personne qui m’a soutenu dans mon activité. Il s’agit de monsieur Ismael Zerbo de ANAPEX Afrique. Il m’a toujours dit : « met du sérieux dans tout ce que tu fais et tu verras que ça va marcher ».
Interview réalisée par Valentin Youmanly