Artisanat: Entre terrorisme et covid-19, la résilience des artisans

L’artisanat burkinabè est riche de sa diversité et du potentiel de ses acteurs. Cependant, depuis 2016, c’est la traversée du désert. Le secteur a mal à son économie hautement tributaire des touristes étrangers. Le terrorisme couplé à la pandémie de la covid-19 a mis à genou le business des arts. Les fermetures des frontières et des lieux de rassemblement ont entrainé un ralentissement voire un arrêt des affaires. Parmi les sous-secteurs de l’artisanat impactés, il y a la sculpture sur bois. Elle continue de fonctionner. Difficilement. Une équipe de Bizya Africa s’est rendue au village artisanal de Ouagadougou pour s’enquérir de la résilience des artisans. C’est devenu la croix et la bannière pour les artisans qui par leur génie redonnaient vie au bois.

La sculpture burkinabè dans toute sa splendeur

Salifou Sawadogo est un artiste sculpteur. Il est installé au village artisanal de Ouagadougou. Pourtant, c’est à Bobo-Dioulasso qu’il a faits ses premiers pas dans la sculpture sur bois. Il y a une vingtaine d’année maintenant. L’apprentissage lui a pris quatre ans. Pour parfaire sa formation, notre artiste va se rendre en Côte d’Ivoire. Il continue au Mali avant de revenir au Burkina Faso. De nos jours, il est propriétaire d’un atelier au village des arts de Ouagadougou. Aujourd’hui, Salifou Sawadogo doit toutes ses réalisations à la sculpture. Il a pu construire sa maison et subvenir aux besoins de sa femme et de ses 4 enfants. Par ailleurs, il emploie quelques jeunes qui apprennent aussi à s’exprimer dans le bois.

Salifou Sawadogo, artiste sculpteur au village artisanal de Ouagadougou

Non loin de son atelier, Kondé Mohamadi occupe l’atelier de son père. La sculpture sur bois, il l’a apprise auprès de celui-ci depuis son bas âge. Après avoir abandonné l’école. L’apprentissage du petit Kondé ne fut pas simple. Mais cela ne l’a pas empêché de remplacer valablement son géniteur. Voici maintenant plus de dix ans que le jeune Mohamadi et la famille Kondé vivent de cette activité en dépit de la crise sécuritaire.

Impact du terrorisme sur le business des artisans

Le terrorisme a visiblement terrorisé les chiffres d’affaire des artisans. Il y a cinq ans de cela, Salifou Sawadogo se frottait les mains. Les affaires étaient bonnes. Il pouvait faire un chiffre d’affaires de plusieurs millions de franc CFA par an.  Mais depuis 2016, la recrudescence des attaques terroristes a considérablement diminué son chiffre d’affaires. En effet, les grands consommateurs de produits artisanaux sont des occidentaux. Avec la crise sécuritaire, le nombre de touristes étrangers a chuté. Ce qui est mauvais pour les affaires car la part de la clientèle nationale dans l’économie des arts est très faible.

Fruit de l’ingéniosité des sculpteurs burkinabè

Impact de la covid-19 dans la sculpture sur bois

Kondé Mohamadi quant à lui pouvait faire un chiffre d’affaires mensuel de 400.000 à 450.0000 franc CFA. Chez lui aussi, les affaires allaient bon train jusqu’à la survenue des premières attaques terroristes. Comme si cela ne suffisait pas, la crise sanitaire liée à la Covid-19 est venue bouleverser l’économie de l’artisanat. En effet, les quelques touristes qui continuaient de venir au Burkina Faso sont bloqués chez eux avec la suspension des vols et la fermeture des frontières. C’est alors la traversée du désert pour Mohamadi Kondé et ses camarades artisans. « Maintenant, nous pouvons faire deux semaines sans vendre un objet » crie ce jeune homme. Actuellement, il a dû stopper la production à cause du stock important des produits artisanaux dans l’atelier familial.

Kondé Mohamadi fait un chiffre d’affaires mensuel de 400.000 à 450.0000 franc CFA

Les attentes des artistes sculpteurs

A l’heure où tout espoir semble perdu, Salifou Sawadogo et Mohamadi Kondé souhaitent la fin de la pandémie pour une réouverture des frontières. L’autre cri de cœur s’adresse au Ministère en charge de la culture pour un accompagnement de l’artisanat burkinabè avec des financements. A défaut, que la loi 1% « artistique » puisse s’étendre aux sculpteurs pour l’acquisition d’objets d’arts pour la décoration des bâtiments administratifs. Sans quoi, il est difficile de tenir face à cette double crise sécuritaire et sanitaire.

Arnaud Fidèle YAMEOGO     

 

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