Burkina Faso : vers la libéralisation du marché de la production de l’électricité

A deux reprises cette semaine, le ministre de l’énergie du Burkina Faso, Bachir Ismaël Ouédraogo, parle de la libéralisation du marché de l’électricité afin d’augmenter la production de mégawatts et de combler le déficit énergétique du pays. Pour 2018, le déficit énergétique est de 50 mégawatts et la croissance annuelle de la demande d’électricité est d’environ 13%. En milieu rural, seulement 3% de la population à accès à l’électricité. La solution de la libéralisation du marché pourrait-être effectivement une réponse au défi de l’énergie. 

 Bachir Ismaël Ouédraogo, ministre de l’énergie

Entre le tête-à-tête du gouvernement avec la Banque mondiale le lundi 21 mai et le lancement du projet « Eco-électrification dynamique » dans la commune de Gourcy le jeudi 24 mai, le ministre de l’énergie, Bachir Ismaël Ouédraogo, n’a pas manqué d’affirmer que : « L’Etat à lui seul ne peut pas résoudre tous les problèmes. Il faut nécessairement un partenariat avec le privé. Tous les pays qui ont pu résoudre le problème énergétique se sont basés sur le secteur privé, la libéralisation donc du secteur de l’énergie et nous allons résolument vers cela ».

Quel est le problème ?

Il se trouve qu’en cette période de forte chaleur, la population est soumise à un régime de délestage qui de mémoire de burkinabè n’a jamais été aussi pire que cette année. La SONABEL (la nationale de l’électricité), est la star incontestée sur les réseaux sociaux tellement elle traumatise en ce moment les burkinabè. Malgré les efforts du gouvernement et des projets sur le terrain censés résoudre le problème, le manque persiste.

Centrale solaire

La centrale solaire photovoltaïque de Zagtouli ne fonctionne pas la nuit, l’interconnexion Bolgatanga-Ouagadougou attend toujours la fin des travaux coté ghanéen et la faible pluviométrie de 2017 limite l’apport des barrages pour ne citer que ces points. Avec la pression populaire et bien d’autres facteurs, on comprend les raisons qui motivent les déclarations du ministre.

La libéralisation du marché est effectivement une piste de solution intéressante dont le gouvernement ne devrait pas se priver. Motivé par la perspective des opportunités, le secteur privé pourrait investir dans la production de l’électricité pour la revendre ensuite à la SONABEL afin qu’elle la redistribue. « C’est dans la production que les acteurs privés peuvent rapidement se montrer plus efficaces. Motivés par des perspectives de gains, ceux-ci gèrent leurs centrales thermiques de manière plus performante [à plus de 90 % de leur capacité, contre à peine 65 % pour les entités publiques en Afrique subsaharienne] », explique, depuis Dakar, Bertrand Heysch de la Borde, directeur infrastructures Afrique de la Société financière internationale (IFC, filiale de la Banque mondiale chargée du secteur privé). L’expérience togolaise s’est montrée concluante sur la question et des sociétés ont pu prendre des crédits sur la base de contrats avec la compagnie d’énergie électrique du Togo pour ensuite financer le développement de leurs centrales thermiques.

Centrale thermique « Azito Phase 3 », Côte d’ivoire

On assistera alors à la création d’un nouveau marché économiquement viable qui à long terme pourrait accoucher des géants électriques.

Le choix de la libéralisation de la production est astucieux aussi parce que celui de la distribution est beaucoup plus complexe, d’après un économiste, « malgré certains succès, comme en Côte d’Ivoire ou en Ouganda, les premières tentatives de privatisation du secteur en Afrique subsaharienne ont aussi échoué parce qu’elles concernaient l’activité de distribution, plus complexe à gérer ».

Et qui parle d’investissement, parle de création d’emplois, parle de création de richesses, le tout bénéfique pour l’économie de la nation.

Si le gouvernement ne reste pas au stade de base, alors, on devrait assister à la mise en place prochainement d’un cadre juridique et réglementaire pour encadrer cette libéralisation du marché de l’électricité. Le succès de l’entreprise dépendra de ce cadre juridique et réglementaire qui devra offrir des garanties de transparence et d’égalité aux investisseurs.

Si le lourd fardeau de la production est amoindri pour la SONABEL, cela lui permettrait d’orienter ses ressources pour améliorer la qualité et étendre son réseau de distribution afin de couvrir pleinement le milieu rural.

Sky, Bizya Africa

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