Dons des entreprises contre Covid-19 : Stratégie RSE ?

Stratégie RSE? Depuis l’apparition des premiers cas de malades du COVID-19, beaucoup d’entreprises burkinabè ont manifesté leur générosité. Est-ce de la sensibilité aux effets du COVID-19 sur les plus démunis et les malades de cette pandémie ? Est-ce une stratégie pour récolter, à coup de campagnes médiatiques, la sympathie des publics ? Toutefois, la solidarité de ces généreux donateurs saura –t-elle perdurer après le COVID-19?  Pourras -t’elle faire l’objet d’une place de choix dans leur plan stratégique de développement. 

Le COVID-19 entraine beaucoup d’effets néfastes dans le monde. Cependant, l’une des conséquences positives de cette pandémie, est l’éveil de l’élan de solidarité des entreprises et des personnes les plus nanties du pays. Ainsi, il ne se passe pas un jour sans que les médias ne fassent l’écho de ces floraisons de dons en nature et en espèces de la part des particuliers, des institutions publiques et des entreprises du privé. Beaucoup de ces entreprises ont officiellement fait ces dons pour remplir leur devoir de Responsabilité sociale des Entreprises (RSE). Toutesfois, force est de constater que ces initiatives ont été faites de manière spontanée et sans planification.

C’est avec le COVID-19 que certaines entreprises mettent en place leur fondation et/ou leur stratégie RSE.

Dans certains cas, ces dons ont été faits au détriment d’autres postes de dépenses.  Par exmeple, l’amélioration des conditions de vie et de travail des collaborateurs. Il ne faut pas occulter que la RSE a aussi un volet interne appelant l’entreprise à être un employeur responsable à travers la promotion de la diversité et de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes. Elle exige aussi de l’employeur une attention particulière dans la gestion des carrières et de la formation du personnel ; de l’accompagnement des transformations et des mobilités ; de la santé, de la sécurité et de la qualité de vie au travail et de la négociation collective et du dialogue social.

Par conséquent, il ne faut surtout pas sacrifier le bien-être des parties prenantes à l’interne. Mais cette préoccupation n’est pas à l’ordre du jour.

Ainsi, c’est avec le COVID-19 que certaines entreprises mettent sur le pied de guerre leur fondation et/ou leur stratégie RSE. Dans la plupart du temps, ces entreprises pour soutenir cet élan de solidarité ont dû trouver au forceps les budgets. Pourtant, tel ne devrait pas être le cas si celles-ci disposaient au préalable d’un plan « RSE et engagements citoyens ». Auquel cas, il aurait juste suffit de réaffecter une partie des fonds et des lignes budgétaires de ce plan annuel vers la lutte contre le COVID-19.

La fondation d’entreprise, pour édulcorer le capitalisme agressif

Mais le constat est que certaines entreprises restent encore insensibles à l’urgence et à la pertinence des défis du siècle liés au climat et au développement. Malgré l’exhortation à prendre une part active dans l’atteinte des ODD (Objectifs pour le développement durable), beaucoup d’entreprises n’intègrent pas les enjeux sociaux et environnementaux dans leur stratégie entreprise.

Pourtant, le Manifeste du Forum de DAVOS[1], édicte qu’ « une entreprise est plus qu’une unité économique génératrice de richesses et qu’elle répond aux aspirations humaines et sociétales en tant que partie intégrante du système social au sens large » et qu’elles doivent mesurer  «  les performances non seulement en fonction du rendement pour les actionnaires, mais aussi de la manière dont elle atteint ses objectifs environnementaux, sociaux  et de bonne gouvernance. »

Ainsi, qu’est-ce que ces entreprises font au quotidien pour soutenir la société et les communautés ? Disposent-elles d’un programme annuel en vue de soutenir les initiatives de développement ? Consacrent-elles une partie de leurs dividendes au profit des actions de développement ? Pour résumer, ont-elles une fondation d’entreprise ou ont-elle une stratégie et une charte RSE ?

La RSE doit permettre de contribuer au mieux être des communautés

La RSE, au-delà d’être pour les entreprises un outil de déploiement des Relations Publiques (RP) pour améliorer leur image et renforcer leur capital sympathie auprès des publics, doit réellement participer à l’atteinte des objectifs économiques, sociaux et environnementaux des communautés au sein desquelles elles sont implantées. On attend surtout des entreprises qu’elles s’engagent en faveur des grands sujets du XXIe siècle et de la transformation du continent africain (défis climatiques, protection de l’environnement, promotion des égalités, réduction du taux de chômage, etc.) avec en toile de fond la conciliation des impératifs du business et des obligations dues aux générations présentes et futures.

La politique RSE édulcore le capitalisme à outrance ou agressif (cette propension et cette course effrénée vers le profit) avec une dose d’éthique en mettant l’humain au cœur des actions et des affaires. Il s’agit surtout de se préoccuper de l’impact de ses activités économiques sur l’environnement et les communautés. En outre, il est également question de soutenir économique les jeunes pousses et les nouveaux entrepreneurs.

Investir la croissance des startups

Cela tombe bien ! Nous sommes dans l’ère des startups. Pourquoi ne pas investir dans leur croissance ou leur développement ? Pourquoi ne pas acquérir des parts dans le capital de ces dernières ou leur apporter l’expertise logistique et technique nécessaire pour assurer leur essor ? Et, plutôt que de voir en elles de potentiels concurrents, il est possible de les envisager comme des extensions de l’entreprise dans des secteurs où celle-ci est inexistante et où elle ne peut opérer.

D’autres voies se sont révélées productives. On retient le succès rencontré par la philanthropie du milliardaire nigérian Tony Elumelu avec son programme d’entrepreneuriat TEF (Tony Elumelu Fondation) et le mentorat de l’homme d’affaire zimbabwéen Strive Masiyiwa. Pourquoi ne pas entrevoir de pareils programmes au Burkina Faso avec le soutien des acteurs et opérateurs économiques ? Vivement que ces initiatives prospèrent auprès des hommes d’affaires burkinabè.

COVID-19, tremplin pour implémenter une stratégie et une charte RSE

En attendant, osons croire que les fondations d’entreprises ne retournent dans leur léthargie et à leur profond sommeil. Et que les chartes « RSE et engagements citoyens » ne seront pas, aussitôt après la fin de la pandémie, rangées dans les tiroirs.

A défaut de réaliser sa stratégie et sa charte RSE, pourquoi ne pas s’inviter dans le programme annuel des organisations de jeunes?

Il serait bénéfique que ces entreprises inscrivent les dons, les soutiens et toute autre forme de sponsoring et de mécénat dans la perspective d’une stratégie à long terme. En le faisant, elles auront suffisamment de matières et d’éléments pour construire un storytelling sur leurs engagements citoyens à l’interne et à l’externe, efficace pour gagner la sympathie des publics.

A défaut de réaliser sa stratégie et sa charte RSE, pourquoi ne pas s’inviter dans le programme annuel des organisations de jeunes comme la Jeune chambre internationale (JCI), le ROTARACT, Léo Club etc ? Ces organisations ont l’avantage d’avoir une ligne de conduite. Elles sont dans des domaines d’intervention et des projets à fort impact sur les communautés. Il ne leur manque que les moyens financiers et logistiques. Et, les entreprises gagneraient à être plus attentives à leur programme d’activités.  Tout en leur laissant une autonomie dans la gestion des projets.

Hermann Bazyomo,

spécialiste en communication

stratégique et relations publiques,

Smart Corporate Conseil

[1] Forum économique mondial, qui se tient annuellement à Davos en Suisse.

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